Lorsque les marques souhaitent s'étendre sur un nouveau marché, la première étape consiste souvent à nommer un agent pour leurs produits, qui sera souvent un professionnel ayant des relations établies avec des grands magasins et autres détaillants multi-marques, ou encore avec des clients fortunés qui pourraient constituer un nouveau marché lucratif pour les produits de la marque en question.
La directive européenne sur les agents commerciaux indépendants a presque 40 ans. Bien avant l'entrée en vigueur de cette directive, le droit français offrait déjà des protections légales aux agents commerciaux, ce qui contrastait avec le droit anglais, qui, lui, à l’époque ne prévoyait aucune protection pour les agents commerciaux jusqu’à ce que la Grande-Bretagne ne transpose cette directive européenne au droit anglais. Cette transposition a été mise en œuvre par les réglementations locales dites « Commercial Agents Regulations » (auxquelles nous référerons dans cet article comme étant les « Réglementations Britanniques ») .
Nous avons énuméré ci-dessous les points clés que vous devez garder à l'esprit lorsque vous, société française, nommez un agent commercial en Grande-Bretagne :
Biens ou biens et services ?
Les protections juridiques apportées par les Réglementations Britanniques ne s'appliquent qu'aux agents commerciaux pour la vente ou l'achat de "biens", et non pas de services. Par exemple, un logiciel vendu sous licence a été considéré comme un « bien », de même que la fourniture d'électricité ou de gaz.
Indemnité ou compensation ?
À la fin du contrat, l'agent commercial aura le droit de recevoir soit une « indemnité », soit une
« compensation » ; cela dépendra de ce qui est stipulé dans le contrat d'agence :
- Si le contrat d'agence ne mentionne rien sur ce qui sera dû à l'agent commercial en fin de contrat, alors la méthode de la compensation s'appliquera. La méthode de la compensation est la position légale, qui s’applique par défaut.
- Cependant, si le contrat d'agence stipule qu'à la fin du contrat, l'agent recevra une indemnité, alors l'agent aura droit à un paiement après la fin du contrat calculé selon la méthode de l'indemnité.
Indemnité ou compensation : quel est le mieux pour vous ?
Nous sommes souvent interrogés par nos clients français sur la question de savoir s'il serait préférable de prévoir que l'agent commercial reçoive une indemnité ou une compensation à la fin du contrat. Les différences entre les deux sont les suivantes :
- Indemnité. Les paiements d'indemnité sont plafonnés ; ils ne peuvent pas dépasser la commission annuelle moyenne versée à l'agent commercial calculée sur les cinq dernières années du mandat (ou si le mandat a duré moins de cinq ans, la commission annuelle moyenne sur la durée réelle du mandat).
Ce plafond est très utile pour les sociétés mandantes, car il leur permet de quantifier leur exposition maximale vis-à-vis de leurs agents commerciaux et de la factoriser dans leurs comptes. Cela rend également les litiges beaucoup plus susceptibles d'être réglés à l’amiable, et il y a donc statistiquement très peu de litiges d'indemnité portés par devant les tribunaux anglais. Le plafond n'est pas le montant automatiquement payable ; il y existe des argument que les sociétés mandantes peuvent avancer pour défendre que le montant de l’indemnité dû à l'agent commercial est inférieur au plafond.
- Compensation. La compensation n'est, quant à elle, pas plafonnée, et de nombreuses variables entrent en jeu dans son calcul, ce qui rend les litiges en matière de compensation plus difficiles à régler à l’amiable.
Le calcul de la compensation en Grande-Bretagne n'est pas effectué de la même manière qu'en France. En Grande-Bretagne, la jurisprudence de référence pour le calcul de la compensation a établi que la compensation doit être calculée en fonction de la valeur du mandat d’agence immédiatement avant la fin du contrat du point de vue d’un tiers acquéreur fictif (en supposant que le mandat aurait continué avec cet acquéreur).
Comme cela nécessite que l’activité de l'agence soit valorisée, un expert-comptable est généralement requis pour préparer des rapports d'évaluation. La compensation est calculée en fonction du « revenu net annuel maintenable » par le fonds de commerce de l’agence multiplié par un coefficient. Il n'y a pas de coefficient standard, bien que pour une agence prospère, on pourrait s'attendre à ce qu'un coefficient d’au moins 4 soit appliqué. De même, des différends naissent souvent entre la société mandante et son agent quant à l’évaluation des coûts de l’activité qui seront déduits de la commission brute pour arriver au revenu net maintenable de référence.
- Quelle est donc la meilleure option pour la société mandante ? En général, il est préférable pour l’entreprise de prévoir dans le contrat d'agence que l'indemnité s'appliquera (plutôt que de prévoir au contrat une compensation, voire de ne rien stipuler du tout au contrat, qui entrainerait l’application par défaut de la compensation).
En résumé :
- Le droit à une compensation est appliqué par défaut à un agent commercial en fin de contrat, sauf si le contrat d'agence prévoit une indemnité ;
- la compensation s'applique lorsque la société mandante et son agent ont un contrat d'agence non écrit (c’est-à-dire verbal); et
- la compensation est difficile à quantifier, il en résulte que les litiges sont notoirement difficiles à régler à l’amiable en amont d’une action judiciaire.
Il en résulte que la meilleure pratique est pour les sociétés mandantes de mettre en place un contrat d'agence écrit (avant que l'agent commercial ne commence à travailler), et que ce contrat prévoit une indemnité plutôt qu'une compensation payable en fin du contrat.
Article traduit par notre groupe français sur la base d’un article écrit par notre experte en droit commercial, Emma Roake,.
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